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    Papy, conte-nous ta terre lointaine (22) 

     

     

    22. Le cây nêu

     

     

    - Papy, qu’est-ce cette perche de bambou avec un morceau de tissu marron au sommet, qu’on voit devant les maisons dans ton album de photos de nouvel an ?

     

    - On l’appelle un cây nêu. Les gens de ma terre lointaine ont l’habitude de le planter devant leurs maisons pour éloigner les démons qui pourraient venir les embêter pendant les trois jours du Têt.

     

    - Les démons existent dans ton pays aussi ? Et ils ont peur de ce cây nêu ?

     

    - Oui, mes chers petits-enfants, vous allez comprendre à travers cette légende.

     

    Il était une fois une bande de méchants démons qui terrorisaient les habitants d’un village, surtout à l’occasion du nouvel an. En outre, ils étaient très taquins et joueurs.

     

    Un jour, le roi des démons, nommé Démon Rouge, déclara aux villageois cette phrase sibylline : « Nous mangerons la tête, et vous les pieds ! », que ceux-ci ne comprenaient pas.

     

    Mais à la récolte suivante de riz, les démons revinrent pour s’emparer de tous les épis de riz, en s’esclaffant en chœur : « Nous mangerons toujours la tête, et vous toujours les pieds ! ». Les villageois n’avaient plus rien à manger, car les démons ne leur laissaient que la paille.

     

    N’ayant plus de riz, ces pauvres paysans affamés allèrent alors à la pagode du village pour prier et appeler le Bouddha à l’aide. Celui-ci leur apparut et leur conseilla :

     

    - À la prochaine saison, ne cultivez plus de riz mais des patates douces !

     

    Effectivement, les démons furent tout dépités quand ils revinrent pour récolter leur dû : les paysans pouvaient garder les patates qui se trouvaient au pied des plantes, et les démons devaient se contenter des fanes. Mais ce qui était dit était dit !

     

    Alors, furieux, Démon Rouge décréta :

     

    - Nous mangerons et la tête et les pieds !

     

    Très inquiets, les villageois firent de nouveau appel au Bouddha, qui leur dit :

     

    - Ne cultivez plus de riz ni de patates, mais du maïs !

     

    Les gens l’écoutèrent et plantèrent du maïs dans tous leurs champs.

     

    Et à la moisson, les démons furent encore battus par le stratagème du Bouddha : les paysans pouvaient garder les épis de maïs qui ne poussaient ni à la tête ni au pied des plantes, mais au milieu.

     

    Démon Rouge entra alors une terrible colère et menaça les villageois :

     

    - Si c’est comme çà, nous allons confisquer toutes vos terres, et tout ce que vous y cultiverez nous appartiendra !

     

    Puis il mobilisa des milliers et des milliers de démons de toutes les couleurs et de toutes les tailles pour occuper les terres des paysans.

     

    Ceux-ci, terrifiés, firent de nouveau appel au Bouddha. Celui-ci vint au devant des démons et proposa à leur roi :

     

    - Bon, vous êtes trop nombreux et trop puissants face aux humains pour qu’ils puissent se défendre. Faisons un partage équitable des terres entre vous et eux.

     

    Les démons se méfièrent :

     

    - Comment pouvons-nous faire un partage équitable ?

     

    - C’est très simple : plantons une perche de bambou dans ce champ puis j’attacherai ma robe de bure à son sommet. L’ombre que fera le soleil de midi avec ma robe délimitera la portion de terre qui appartiendra aux humains. Vous, les démons, garderez le reste.

     

    - Ha, ha, ha ! s’écrit joyeusement Démon Rouge. Si ce n’est que l’ombre de votre robe, nous acceptons volontiers le partage et respecterons définitivement l’accord !

     

    Immédiatement, le Bouddha demanda aux villageois d’aller abattre un grand bambou et d’en enlever toutes les feuilles. Puis il enleva sa robe de bure pour l’accrocher à la tête du bambou, avant d’ordonner aux gens de planter cette perche dans le sol.

     

    Quand le soleil fut au zénith, la robe au sommet de la perche projeta sur le sol une ombre qui tout doucement s’élargit. Et au fur et à mesure que l’ombre s’agrandit, elle repoussa les démons hors de son périmètre. Et elle s’élargit encore et encore, jusqu’à recouvrir presque toute la terre ferme pour bousculer les démons vers le rivage de l’océan.

     

    Mais avant de tomber dans l’eau, tous les démons épouvantés se jetèrent à plat ventre au sol et supplièrent le Bouddha en pleurant :

     

    - De grâce, ô grand Bouddha miséricordieux ! Nous avons compris la leçon, nous allons nous réfugier dans l’océan pour laisser la terre ferme aux humains. Mais les tombes de nos ancêtres sont sur la terre ferme ! Par pitié, permettez-nous d’y revenir au moins une fois par an pour les honorer au nouvel an !

     

    - D’accord, leur répondit le Bouddha dans sa grande compassion. Vous pourrez revenir honorer les tombes de vos parents pendant les trois jours du nouvel an. Mais je vous interdis d’embêter les humains. Partout où vous verrez cette perche de bambou avec un morceau de ma robe au sommet, là sera la propriété des humains, et vous n’y entrerez pas.

     

    Voilà pourquoi, mes chers petits-enfants, les habitants de ma terre lointaine ont pris l’habitude d’ériger cette perche avec un morceau de tissu marron au sommet, pour éloigner les démons qui reviennent honorer les tombes de leurs ancêtres pendant les trois jours du nouvel an. Cette perche magique, ils les appellent cây nêu ou l’arbre qui rappelle la recommandation du Bouddha.

     

    Et pour effrayer définitivement les démons, ils font aussi exploser des pétards afin que ceux-ci  ne s’approchent pas trop près de leurs habitations.

     

     

    Sources.

     

    ‘‘Sự tích cây nêu ngày tết’’ (‘‘Légende du cây nêu du nouvel an’’), in Nguyễn Đổng Chi, Kho tàng truyện cổ tích Việt Nam (Le trésor des légendes et des contes du Việt Nam), op. cit., t. 1, 219-221.

     

    Giovanni Filipo de Marini, Relation nouvelle et curieuse des royaumes de Tunquin et de Lao, op. cit, pp. 248-249.


     

     


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    Chronochosetrose 6

     

    Y a-t-il des maux roses

    Pour colorer les choses

    Qui nous gâtent la vie

    En rompant l’harmonie ?

     

    (Sixième contribution de Dông Phong à « Chronochosetrose », jeu poétique de Temps-Pestif, le blog d’An Amzer Poésies). 

     

     

     


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    Chers ami(e)s,

     

    J’ai le plaisir de vous faire part de ma nouvelle publication (mon 20ème opus) :

     

    Nguyễn Đình Chiểu

    (1822-1888)

     

    Lục Vân Tiên

     

    Le deuxième joyau littéraire du Việt Nam

    Traduit et annoté par Nguyễn Tấn Hưng

    Préfacé par Pascal Bourdeaux

     

    ISBN : 978-2-35664-122-9

    262 pages

    Éditions Joseph OUKNINE

    http://www.ouaknine.fr - joseph@ouaknine.fr 

    Livres faits main à la manière de vieux grimoires, reliés cuir, dorés sur tranches. 

     

     

    Bien cordialement.

    Nguyễn Tấn Hưng

     

     

     

     

     

     

     


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    Monologue 14

     

    Un Big Brother nous gère

    Selon ses manières !

    Sommes-nous impuissants

    Devant ce malfaisant ?

     

                            27.1.2016

     


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